Hedy Lamarr, de son vrai nom Hedwig Kiesler, grandit à Vienne où elle naît en 1914 . Son père lui transmet sa passion pour les technologies. La jeune fille bricole en autodidacte pendant toute son enfance et fini par développer de solides facultés techniques.
Elle se passionne pour le cinéma en découvrant Metropolis de Frits Lang. À 18 ans, elle frappe à la porte des studio Sascha à Viennes pour aider financièrement ses parents. En 1933, elle tient le premier rôle dans le film Extase (1933) où sa nudité et la première scène d’orgasme devant une caméra font scandale. Le pape Pie XI condamne le film et les scènes polémiques sont supprimées de la plupart des versions européennes et américaines, mais sa carrière est lancée. La jeune Hedy accède au statu de sex-symbole qui ne la quittera plus jamais. La même année, elle épouse l’industriel autrichien Friedrich Mandl, fournisseur d’arme pour Mussolini et proche d’Hitler. Leur relation se dégrade rapidement, en 1937 elle s’enfuit pour la Suisse puis l’Angleterre. C’est aux États-unis qu’elle s’établira définitivement et continuera sa carrière aux côtés des plus grands acteurs de son époque.
N’importe quelle femme peut avoir l’air glamour. Il suffit de se tenir tranquille et d’avoir l’air idiote.
Hedy Lamarr
Elle incarne l’archétype de la femme fatale. Intelligente, capricieuse, elle s’implique dans la lutte antifasciste menée par l’industrie hollywoodienne, la presse multiplie les articles et les potins à son sujet. Véritable égérie, elle inspire Walt Disney pour la création du personnage de Blanche Neige et Bob Kane s’en inspire pour dessiner Cat Woman.
Mais Hedy Lamarr ne limite pas ses activités à la comédie et au faste de la vie hollywoodiennes. Passionnée de design et inventrice compulsive, elle aménage un petit atelier dans chaque lieu où elle emménage. Elle y travail à tout types de projets : Soda en cube, aile d’avion, collier canin phosphorescent, système pour aider les handicapés à sortir de leur bain, etc. Mais c’est avec l’aide de son ami, le compositeur et pianiste George Antheil qu’elle lèguera sa plus grande contribution à la société.
Des torpilles au Wifi
Les deux amis se rencontrent dans les milieux dadaïstes et vivent la même passion pour l’innovation et les technologies. À la fin des années 30, la guerre se répand en Europe et dans l’Atlantique, profondément anti-fascistes et anti-nazi, c’est au cours de leur longues discutions qu’ils élaborent l’idée de trouver un système qui puisse réduire les pertes humaines dues aux torpillage des navires civiles.
Hedy Lamarr avait connaissance des techniques de guidages des torpilles allemandes depuis son mariage avec le vendeur d’armes Fredrich Mandl. George Antheil de son côté connaissait les systèmes de contrôle automatiques et les séquences de sauts de fréquence des pianos à rouleaux mécaniques qu’il utilisait pour la composition musicale. À eux deux, ils développent un système permettant d’émettre un signale de guidage sécurisé applicable aux torpilles radio-guidées pour permettre au système émetteur-récepteur de la torpille de changer de fréquence. Ce procédé novateur permettait de rendre pratiquement impossible la détection d’une attaque sous-marine par l’ennemi.
Le 10 juin 1941, ils déposent un brevet pour leur système de guidage. Souhaitant contribuer à l’effort de guerre, ils passent leur invention dans le domaine publique. Mais leur concept n’est pas retenu par l’armée américaine qui le trouve trop complexe. Il faudra attendre la crise cubaine des années 60 et l’affaire des missiles soviétiques pour que l’état major utilise le procédé.

Le concept de transmission basé sur l’étalement de spectre par haute fréquence est depuis, très largement utilisé. C’est ce mode de transmission qui, aujourd’hui encore, permet de gérer le positionnement des satellites (GPS), les communications entre les navettes spatiales et le sol, les échanges militaires chiffrés, la téléphonies mobiles, la technologie wifi ou encore le Bluetooth.
Une reconnaissance tardive
À l’approche des années 60, la carrière d’Hedy Lamarr commence à se dégrader. Ses caprices de diva, son comportement misanthrope, de mauvais choix cinématographiques, des opérations de chirurgie esthétique ratées l’éloignent peu à peu des studios et commencent à façonner une légende noire autour de l’actrice. Elle dilapide sa fortune et son dernier contrat cinématographique est dénoncé. Sa carrière s’arrête définitivement en 1965.
Elle n’apprendra que tardivement, en 1973, au hasard d’une publication rendue possible grâce à la levée de la classification « secret défense », l’utilisation de son invention. En 1997, Hedy Lamarr reçoit le prix de l’Electronic Frontier Foundation américaine pour sa contribution à la société mais ne se rend pas à la cérémonie. Vivant recluse dans son appartement d’où elle ne communique que par téléphone avec le monde extérieur tout en continuant a travailler sur de nouvelles inventions, elle fini sa vie, seule, le 19 janvier 2000 à l’âge de 85 ans.
À partir des années 2000 et grâce à l’explosion des technologies d’internet, le nom d’Hedy Lamar devient une des grandes références du design et de l’innovation. En 2003, elle figure sur la première de couverture de Dignifying Science: Stories About Women Scientists. Depuis 2005, le 9 novembre, jour de son anniversaire, on célèbre la journée des inventeurs dans les pays Germanophones. Elle et son acolyte George Antheil sont admis à titre posthume au National Inventors Hall of Fame en 2014.
En 2018, Alexandra Dean réalise un documentaire sur Hedy Lamarr. Hedy Lamarr : from Extase to Wifi dépeint le portrait d’une femme forte à l’esprit brillant, en avance sur son époque, qui a choisi de forger son destin et à qui nous devons bien plus que des films.
Liens utiles et références :
- Bombshell : The Hedy Lamarr Story : entretien avec Alexandra Dean — OMPI Magazine, Avril 2018
- Voici comment Fonctionne le Wi-Fi — Vidéo sur la chaine “sympa”
- Hedy Lamarr (1914-2000), la dame sans passeport d’Hollywood — France Culture Juillet 2020
- Ecstasy — Gustav Machatý, 1933